Abattoirs : bien-être animal et humain, même combat !
Une enquête parlementaire sur la maltraitance des animaux de boucherie a aussi étudié les dures conditions de travail des salariés des abattoirs et émis des propositions d'amélioration. Car "le bien-être animal est foncièrement lié au bien-être humain".
Des vidéos de l'association L214 montrant la maltraitance, voire la cruauté envers des animaux dans les abattoirs ont provoqué une vive émotion en France. Elles ont incité le député Olivier Falorni à réclamer puis présider une commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie. Objectif : émettre des propositions fortes pour améliorer le bien-être animal. S'appuyant sur le constat que ce dernier "est foncièrement lié au bien-être humain", le rapport, adopté en septembre, comporte un chapitre intitulé "Mettre les salariés au centre des préoccupations". "Dans un contexte de mise à mort massive et de stress", les cadences poussent à traiter des animaux encore vivants comme des pièces industrielles. La commission met en garde contre "une forme de mithridatisation psychique" (insensibilité) des agents affectés en permanence aux postes d'étourdissement ou de saignée et perdant la vigilance nécessaire. La possibilité d'arrêter la chaîne en cas de dysfonctionnement, notamment pour défaut d'étourdissement avant l'égorgement, est ainsi peu mise en oeuvre. D'autant que "les salariés travaillent avec une hiérarchie oppressante qui ne cesse de relancer l'opérateur au moindre arrêt de chaîne", témoigne Michel Le Goff, de la Fédération nationale agroalimentaire CGT, auditionné.
Environnement "agressif"
Le rapport pointe les risques auxquels expose un environnement de travail "agressif" : températures extrêmes, bruit, agents chimiques, horaires décalés et/ou excessifs, travail répétitif, non-remplacement des absents, manque de reconnaissance. Conséquence de la pénibilité : la fréquence des troubles musculo-squelettiques (TMS), "première maladie professionnelle des opérateurs". Pour ce qui est des accidents du travail (blessures, chutes de plain-pied), la Caisse nationale d'assurance maladie relève un taux de 80,3 pour 1 000 travailleurs en 2014 dans la transformation et conservation de viande de boucherie, contre 47 pour le secteur de l'alimentation. Tous ces éléments expliquent la faible attractivité des abattoirs, qu'illustre un recours important à des "tâcherons" prestataires de services, des intérimaires ou des travailleurs immigrés.
Parmi les 65 propositions de la commission d'enquête, plusieurs concernent directement les salariés. Elles consistent notamment à compléter la formation, instaurer des vidéos à visée pédagogique et de contrôle, développer l'ergonomie des postes de travail, rendre obligatoire la rotation sur les postes dans les entreprises de 50 salariés et plus, moderniser les équipements, limiter le volume d'abattage par opérateur, ou encore sensibiliser l'encadrement aux problèmes psychiques des travailleurs. Si le rapport n'évoque qu'incidemment le rôle du CHSCT, il indique que la convention collective nationale du secteur intègre depuis 2015 un accord sur la pénibilité et les moyens de la prévenir.
Ces mesures d'amélioration des conditions de travail ne figurent pas dans la proposition de loi déposée le 9 novembre par Olivier Falorni, dont le préambule rappelle l'importance du sujet mais précise qu'il relève du pouvoir réglementaire.