La dure condition de petite main de la Toile
Pas moins de 260 000 travailleurs, dont 15 000 réguliers, exerceraient en France des missions indispensables aux contenus d'Internet. Modérer les commentaires sur les réseaux sociaux, légender une photo, corriger un texte prochainement mis en ligne... Autant de petites tâches améliorant les performances de l'intelligence artificielle et menées à bien par une population invisible. Cette main-d'oeuvre vient de faire l'objet d'une première enquête, coordonnée par Télécom-ParisTech et le CNRS et baptisée DiPLab (pour Digital Platform Labor). Celle-ci a recueilli en ligne les réponses de près d'un millier de ces "travailleurs du clic", synthétisées dans un document intitulé Le micro-travail en France.
Côté profil, d'abord, il apparaît que les 25-44 ans prédominent dans l'activité (63,4 %), tout comme les femmes (56,1 %), la plupart étant a priori issus des grandes agglomérations, Lyon et Lille précédant Paris. Dans 43,5 % des cas, les 25-64 ans interrogés sont diplômés à bac + 2. Par ailleurs, 27,9 % sont inactifs et 22 % déclarent vivre au-dessous du seuil de pauvreté. Le revenu mensuel moyen récolté grâce au clic s'établit à 21 euros environ par mois. Avec de fortes disparités entre ceux qui ne consacrent que quelques heures par semaine à cette activité et d'autres qui y passent davantage de temps.
Pour être rétribués, les "travailleurs du clic" sont recrutés par l'une des 23 plateformes de microtravail dédiées, dont 14 sont françaises. Lesquelles ont négocié leurs services à des sites clients dont les noms et les ambitions sont méconnus des microtravailleurs. Isolés, ces derniers ne peuvent s'opposer à des décisions péremptoires. Comme lorsqu'un client mécontent d'une tâche ne la paie pas à la plateforme. A terme, le "travailleur du clic" concerné se voit généralement banni de celle-ci. Ce qui n'est pas sans conséquences, si l'on s'en tient à certaines déclarations : 59 % des inscrits de la plateforme Foule Factory affirment que le clic permet de compléter leurs revenus.