Exposés en première ligne, les ouvriers cérusiers
Au XIXe siècle, l'industrie de la céruse est en pleine croissance. Un petit millier d'ouvriers y travaillent, généralement selon le procédé dit "hollandais" : des lames de plomb sont roulées en spirale et enfermées dans un mélange d'acide acétique et de fumier de cheval. Après plusieurs semaines, elles sont décapées et les écailles de céruse qui s'en détachent sont broyées, opération qui dégage une quantité considérable de poussières plombiques. Les ouvriers conditionnent ensuite la céruse en barils de poudre, en pains ou en pâte prête à l'emploi quand elle est mélangée à de l'huile de lin.
Très tôt, les industriels eux-mêmes ont pris conscience de la dangerosité de ce travail et tenté d'apporter des perfectionnements techniques afin d'en diminuer l'insalubrité : c'est le cas de l'usine "modèle" de Théodore Lefebvre, à Lille, récompensée lors de plusieurs expositions universelles (1837, 1844, 1867, 1889). Ces améliorations n'empêchent pas les ouvriers cérusiers d'être victimes du saturnisme dans d'effrayantes proportions : selon les entreprises, ce sont jusqu'à 50 % des ouvriers qui sont hospitalisés chaque année pour des lésions plus ou moins graves atteignant le système digestif puis le système nerveux central, souvent de façon irréversible.