Faire du Code du travail un enjeu de la présidentielle
Le timing a été minutieusement choisi pour contribuer au débat public avant l'élection présidentielle. La Proposition de Code du travail conçue par une vingtaine de chercheurs en droit social de toute la France a fait l'objet d'une conférence de presse le 15 mars dernier et d'un colloque le 31 mars. Le texte a été envoyé en début d'année au Medef et à la CPME (ex-CGPME), ainsi qu'aux candidats à la présidence de la République. L'idée des universitaires est de se présenter comme une force de proposition plutôt que d'être sur la défensive. "Le Code du travail actuel n'a rien d'extraordinaire, il est illisible, épouvantable, donc inapplicable, juge Emmanuel Dockès, professeur de droit social à l'université de Nanterre, à l'initiative du projet. Dans nos sociétés démocratiques, toute personne doit pouvoir lire les règles qui s'imposent à elle."
"Rendre le droit plus effectif". Parmi les spécialistes en droit social qui ont planché sur la proposition, pas un seul n'avait lu le Code du travail actuellement en vigueur dans son intégralité. Selon Emmanuel Dockès, les magistrats chargés d'appliquer ces règles n'y arrivent plus, les inspecteurs du travail non plus. Les chercheurs se sont donc efforcés de les énoncer de façon claire, avec "des phrases simples et en évitant les renvois, car l'imprécision est source de contentieux", estime Josépha Dirringer, maîtresse de conférences à l'université de Rennes 1.
Cette proposition vise à "rendre le droit plus effectif", ajoute pour sa part Franck Héas, professeur de droit à l'université de Nantes. "Il ne s'agit pas de rogner sur les droits et la protection des salariés pour offrir plus de souplesse aux entreprises", précise-t-il, à l'instar de ce que font la plupart des think tanks depuis des années. "Notre Code montre que leurs propositions ne sont pas les seules qui soient intellectuellement envisageables, même si ce sont les seules qui sont financées, donc envisagées", déclare Emmanuel Dockès.
Ce nouveau Code est ainsi une réponse au rapport de Jean-Denis Combrexelle et au livre de Robert Badinter et Antoine Lyon-Caen, professeur de droit à Nanterre, qui ont précédé et nourri l'élaboration de la loi travail. "Nous ne pouvions pas rester inactifs dans un domaine qui concernait notre matière", commente Emmanuel Dockès. Le mouvement Nuit debout et la mobilisation contre la loi travail ont montré, selon lui, l'importance du droit du travail pour tout un chacun.