Faire du règlement intérieur un atout pour le CHSCT
Depuis la loi Rebsamen, le CHSCT doit se doter d'un règlement intérieur. Un document qui, s'il est bien élaboré, peut servir à améliorer le fonctionnement de l'instance et à clarifier les moyens dont elle doit disposer pour remplir ses missions.
Jusqu'à la loi Rebsamen du 17 août 2015, aucun texte ne traitait du règlement intérieur (RI) du CHSCT. Il fallait, pour le fonctionnement de l'instance, se référer à plusieurs articles du Code du travail. Dorénavant, conformément à l'article L. 4614-2 du même code, le CHSCT doit déterminer dans un règlement "les modalités de son fonctionnement et l'organisation de ses travaux". Une obligation relative, puisque l'absence de RI n'est pas sanctionnée.
Lever les ambiguïtés de la loi
D'un point de vue formel, le document doit être adopté au cours d'une réunion plénière, après inscription de ce point à l'ordre du jour. Le vote se fait selon les modalités habituelles, à savoir la majorité des membres présents. A ceci près que le président, représentant l'employeur, y participe, car il ne s'agit pas d'une consultation de la délégation du personnel. Néanmoins, sa voix n'est pas prépondérante. Le RI est un document propre au comité, totalement distinct du règlement de l'entreprise.
L'article L. 4614-2 ne définit pas de règlement type, ni les rubriques et articles qui doivent y figurer, mais bon nombre de "modèles" se trouvent aisément. Sur son contenu, la première question à se poser demeure toutefois stratégique : un règlement intérieur pour quoi faire ? Le premier objectif est d'apporter des réponses aux imprécisions de la législation. Par exemple, l'article L. 4614-9 du Code du travail stipule que "le CHSCT reçoit de l'employeur les informations qui lui sont nécessaires pour l'exercice de ses missions, ainsi que les moyens nécessaires à la préparation et à l'organisation des réunions et aux déplacements imposés par les enquêtes ou inspections". Or, si certaines informations récurrentes sont précisées par divers textes, il n'en est pas de même pour celles concernant les projets sur lesquels le CHSCT est consulté. De même, comment s'organisent concrètement les "moyens nécessaires à la préparation des réunions" ? Faut-il une réunion préparatoire ? Avec qui ? A quel moment ? Bien entendu, les réponses à ces questions doivent être adaptées en fonction du cadre d'intervention du CHSCT : établissement unique ou multiples implantations avec une grande diversité d'activités.
Attention, cependant, la Cour de cassation est venue préciser que le RI ne peut imposer à l'employeur des obligations non prévues par la loi. S'il contient des dispositions de ce type (octroi d'heures de délégation complémentaires, allocation d'un budget de fonctionnement...), leur validation claire et non équivoque par le président, ou l'employeur, est nécessaire. A défaut, il peut en effet en demander l'annulation devant le tribunal de grande instance. L'employeur peut également accepter par engagement unilatéral des mesures auxquelles il n'est pas légalement tenu. Mais il pourra aussi unilatéralement revenir sur cette décision par une dénonciation régulière. En revanche, le refus de l'employeur d'appliquer les clauses licites d'un règlement intérieur serait constitutif d'un délit d'entrave.
En règle générale, la plupart des règlements comportent des dispositions sur l'exercice du secrétariat, les moyens mis à la disposition du CHSCT, les réunions du comité, la mise en oeuvre de ses attributions ou de celles de commissions facultatives.
Concernant le secrétariat, il s'agira tout d'abord de définir les modalités de sa désignation, l'étendue de ses responsabilités, la possibilité de désigner un éventuel secrétaire adjoint, en déterminant son rôle. Légalement, le secrétaire fixe l'ordre du jour avec l'employeur. Sur ce point, le RI peut préciser comment s'organise la collecte préalable des points à aborder. Le secrétaire réalise aussi le procès-verbal des réunions. Le RI pourra acter les modalités d'élaboration et de rédaction du PV, celles de sa diffusion. Le secrétaire doit aussi veiller à l'exécution des décisions du comité. Le RI pourra utilement déterminer les dispositifs de suivi de ces décisions.
Sur les moyens mis à la disposition du CHSCT, le règlement peut définir les conditions d'octroi d'un local de réunion, d'un matériel informatique, d'une documentation technique et juridique. Idem sur les règles de prise en charge des frais de déplacement des représentants du personnel (utilisation d'un véhicule de service, remboursement des frais...). Il peut également indiquer comment sont gérés les courriers adressés au CHSCT, conservées les archives, diffusés les documents...
Toujours sur un plan fonctionnel, un mode d'animation des réunions peut être établi : comment faciliter la prise et la liberté de parole, décider d'une suspension de séance... Il peut être acté que chaque point à l'ordre du jour est accompagné d'un document, en fixant un délai de transmission. Gagneront aussi à être précisées les relations avec les membres consultatifs ou les invités de droit (inspecteur du travail, médecin du travail...), afin notamment de s'assurer de leur présence et de leur participation.
Un mode d'emploi de la consultation
Pour appuyer la mise en oeuvre des attributions du CHSCT, le règlement peut rappeler les principaux cas d'information/consultation, en en précisant les modalités. Par exemple, comment le CHSCT est-il consulté lors de l'élaboration et de la mise à jour du document unique d'évaluation des risques (DUER) ? A quel moment peut-il intervenir sur son contenu ? Concernant la base de données économiques et sociales (BDES), dont la mise à jour par l'employeur est censée déterminer le début du délai de consultation pour certains sujets, la loi se contente de stipuler que les informations fournies sont celles communiquées de façon récurrente au CHSCT. Il convient donc d'en faire l'inventaire. Le RI peut aussi prévoir des modalités pratiques pour les inspections et enquêtes du comité, ainsi que la coordination de la consultation avec les autres institutions représentatives du personnel.
Enfin, doivent être spécifiées les éventuelles missions confiées à des membres du CHSCT et les attributions de commissions facultatives. Le CHSCT peut en effet instaurer des commissions ad hoc, présidées par des élus, pour les enquêtes après accident du travail, sur l'instruction de cas de harcèlement ou pour le suivi de reclassements, en lien avec les délégués du personnel, ou encore celui de réorganisations, en coopération avec le comité d'entreprise. Ces commissions n'ayant pas d'existence légale, seul le règlement intérieur peut leur en octroyer une, en précisant le nombre de membres et leur désignation, leur rôle, les prérogatives et missions qui leur sont octroyées, les moyens éventuels qui leur sont conférés.
Les dispositions du règlement intérieur doivent correspondre aux besoins réels du CHSCT, en évitant l'écueil d'un texte trop détaillé qui deviendra vite contraignant et inapplicable, ou inversement celui d'un texte trop général qui n'apporterait rien. Le RI est applicable tant qu'il n'a pas fait l'objet d'une modification ou d'une abrogation par la majorité des membres présents, au cours d'une réunion plénière. Le changement de dénomination sociale d'une entreprise n'entraîne pas sa caducité, ni le renouvellement du CHSCT, sauf à le prévoir dans le règlement lui-même.