FO veut des organisations du travail moins pathogènes
Le 15 novembre dernier, la confédération syndicale Force ouvrière a réuni ses militants et des experts afin d'évoquer les effets délétères des nouveaux modes d'organisation du travail et les pistes d'action pour les prévenir.
Poser les jalons d'une action syndicale transversale et pérenne dans le domaine de l'organisation du travail. " C'était l'objectif du colloque organisé le 15 novembre dernier par Force ouvrière au Conseil économique, social et environnemental, sur le thème " L'impact social des modes d'organisation du travail ". Avec un premier constat : les conditions de travail se dégradent, comme le montre le nombre élevé des accidents et maladies professionnelles, notamment d'ordre psychologique.
Coût psychique
Parmi les experts invités, le sociologue Mario Correia a souligné le coût psychique des " injonctions paradoxales " auxquelles sont soumis les salariés, dans un contexte d'accélération du rythme de travail et de flexibilisation de l'organisation du travail. L'affichage d'une autonomie dans le travail s'accompagne, a-t-il expliqué, du respect obligatoire de normes, procédures et contraintes bureaucratiques. Sébastien Roux, de la direction de l'Animation de la recherche, des Etudes et des Statistiques au ministère du Travail, a fait état de la multiplication par cinq en vingt ans du nombre de salariés soumis à des règles et des délais de production. Evoquant la lean production, mode d'organisation très présent dans l'industrie automobile, il lui a imputé une plus grande pénibilité physique, une intensification du travail et des dysfonctionnements. Or l'utilisation de cette méthode tend à s'étendre à l'industrie aéronautique, aux services... " Et vers les tribunaux ", a dénoncé un magistrat syndiqué à FO, inquiet du manque de moyens et du rythme de travail imposé. A en croire le sociologue Vincent de Gaulejac, les chercheurs eux-mêmes ne seraient pas à l'abri, courant de projet en projet au détriment de leur travail d'enseignement et de recherche.
Entretiens et récompenses collectives
D'autres travers des nouveaux modes d'organisation ont été évoqués par les participants : les horaires à rallonge et le travail du week-end dans le commerce, les échanges de mails professionnels en pleine nuit dans un service communication, les externalisations, les objectifs irréalistes, les entretiens d'évaluation anxiogènes... A la tribune, une militante syndicale FO a exposé l'action des représentants du personnel dans son association face à la souffrance du personnel : interpellation du médecin du travail et du psychologue, droits d'alerte, questionnaire auprès des salariés, expertise confiée à un cabinet extérieur... Jean-Claude Delgenes, du cabinet d'expertise Technologia, a exhorté les CHSCT à s'investir dans la prévention des risques et a suggéré de remplacer les entretiens d'évaluation individuels par des entretiens collectifs d'échange sur le travail et des récompenses collectives.
Face à la centaine de syndicalistes FO présents dans la salle, les représentants du Medef et de la CGPME se sont voulus rassurants. Au nom du Medef, Benoît Roger-Vasselin, directeur des ressources humaines de Publicis, a souligné que " Laurence Parisot a placé ses deux mandats sous l'égide de la responsabilité sociale ". Marie-Alice Medeuf-Andrieu, secrétaire confédérale Force ouvrière, a conclu le colloque en invitant les militants à remettre l'humain au centre des organisations du travail. Un peu plus tôt, le secrétaire général de la Confédération, Jean-Claude Mailly, avait annoncé un projet de livre blanc sur l'organisation du travail et le lancement par FO d'une revue spécialisée sur ces sujets.