Des injonctions cachées
Transposés pour la plupart de l’anglais, des termes aux connotations positives sont apparus dans le langage des promoteurs du flex office. Si ces aménagements peuvent être pertinents, leur terminologie ambiguë charrie de nouvelles injonctions. L’aménagement, fait de mobilier souvent standardisé, simplifie les modifications d’effectifs et d’organisation. Il impose la « flexibilité » aux utilisateurs contraints de s’adapter au nombre réduit de postes.
Le « bureau dynamique » voudrait aussi faire de l’obligatoire mise en mouvement du salarié le reflet du dynamisme de l’entreprise. Transposée d’une méthode de gestion de projet, « l’agilité » présente, elle, les espaces du flex comme ceux de l’agilité mentale des employés et des organisations, là où ils demandent aussi déplacements et adaptabilité à un environnement contraint par les postes en sous-nombre.
Le flex office crée des espaces complémentaires aux noms particuliers. L’espace « collaboratif » entend favoriser la collaboration impromptue et permettre de travailler à plusieurs, souvent dans des postures inhabituelles, par exemple debout. L’aménagement original de l’espace « créatif » est réputé stimuler la créativité. Ces lieux peuvent être pertinents pour l’activité, mais leurs noms, comme la « convivialité », portent une injonction à peine dissimulée : il existerait des moments pour collaborer, être créatif ou convivial, et l’on ne saurait l’être à son poste habituel. Pour faire preuve d’« attractivité », les entreprises jouent sur la séduction à l’aide de décors et de gadgets, au risque de masquer le manque d’analyse des activités. Ne faudrait-il pas un anglicisme qui garantirait des espaces offrant de bonnes conditions de travail ?
B. M.