Le lien entre glyphosate et malformations congénitales officiellement reconnu
Pour la première fois en France, le glyphosate, herbicide controversé produit par Bayer (ex-Monsanto), vient d’être reconnu officiellement comme une cause potentielle de malformations congénitales. La Commission d’indemnisation des enfants victimes d’une exposition prénatale aux pesticides a rendu un avis qui établit un lien de causalité entre l’exposition au glyphosate d’une mère, alors qu’elle était enceinte, et la maladie de son fils, né avec une malformation de la trachée et de l’œsophage.
Cette commission, pilotée par l’épidémiologiste Isabelle Baldi, est une entité du Fonds d’indemnisation des victimes de pesticides (FIVP), créé en 2020, qui concerne les personnes ayant été exposées in utero du fait de l’activité professionnelle d’un ou des parents. L’indemnisation de 36 000 euros sera versée par la mutualité sociale agricole (MSA) au jeune garçon de 16 ans, qui la touchera à sa majorité. En 2006, ignorant qu'elle était enceinte, Sabine Grataloup avait passé du Glyper, un herbicide à base de glyphosate, sur le sol de la carrière équestre où elle travaillait.
La famille avait alerté les autorités dès 2009, pointant la responsabilité de l’herbicide dans l’atrésie dont souffre Théo, qui vit avec une trachéotomie, un trou au niveau de la gorge, depuis qu’il a trois mois, et a subi plus de 50 interventions chirurgicales. La décision de la commission a été rendue en mars 2022. Mais la famille Grataloup avait préféré garder l’information confidentielle pour se préserver des nombreux messages haineux dont elle a été la cible sur les réseaux sociaux depuis qu’elle a assigné en justice Monsanto, le producteur du Roundup, en mai 2018. Une procédure toujours en cours.
Si Sabine Grataloup a finalement décidé cette semaine de révéler cette décision d’indemnisation, c’est qu'un nouveau vote de la Commission européenne, prévu ce vendredi 13 octobre, pourrait bien prolonger de dix ans l’autorisation de commercialisation du glyphosate dans l’Union européenne. La molécule a pourtant été classée en 2015 « cancérogène probable » pour les humains, par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ).
Son autorisation actuelle dans l’Union européenne avait déjà été renouvelée en 2017 pour cinq ans, et expirait le 15 décembre 2022, avant une nouvelle prolongation d’un an dans l’attente d'une évaluation scientifique de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Le vote prévu cette semaine constitue donc un tournant capital dans l’utilisation du glyphosate pour les dix ans à venir.