Une loi pour protéger les lanceurs d'alerte
Henri Pézerat, André Cicolella, Irène Frachon... Ces toxicologues et ce médecin ont dû braver leur hiérarchie ou de puissants intérêts économiques pour alerter les autorités sanitaires et le public respectivement sur les dangers de l'amiante, des éthers de glycol et du Mediator. Sans disposer d'un statut protégé. Un manque comblé par une proposition de loi relative "à l'indépendance de l'expertise en matière de santé et d'environnement et à la protection des lanceurs d'alerte", adoptée en première lecture par le Sénat le 21 novembre. "Si on avait écouté les ouvrières de Condé-sur-Noireau lorsqu'elles disaient qu'elles voyaient leurs collègues mourir à 40 ans, on aurait peut-être réglé la question de l'amiante dix ans plus tôt", déclare la sénatrice du Nord Marie-Christine Blandin (Europe Ecologie-Les Verts), à l'initiative du texte de loi.
Ce dernier prévoyait à l'origine la création d'une Haute Autorité de l'expertise scientifique et de l'alerte en santé et environnement, dotée de pouvoirs étendus, non retenue pour raisons financières. "Pourtant, son coût de fonctionnement serait ridicule par rapport à ce que coûte la réparation des scandales sanitaires successifs, que j'évalue à quelque 2 milliards d'euros par an", estime la sénatrice. En revanche, une Commission de la déontologie et des alertes en matière de santé et d'environnement sera créée, censée émettre des recommandations déontologiques vis-à-vis de l'expertise scientifique et technique.
Le Code du travail sera aussi modifié, afin de permettre à tout salarié de lancer une alerte et au CHSCT de l'examiner et d'être consulté en cas de danger pour la santé ou l'environnement. Enfin, la protection des lanceurs d'alerte sera assurée par un article du Code de la santé publique interdisant toute discrimination dans l'emploi vis-à-vis d'une personne témoignant d'un danger pour la santé ou l'environnement. L'Assemblée nationale devrait examiner le texte en janvier.