La mission sur les arrêts maladie pointe les conditions de travail
La note d’étape remise au Premier ministre par la mission sur les arrêts maladie relève que l’une des causes principales de l’augmentation des dépenses d’indemnisation est la conséquence du recul de l’âge de la retraite, avec un impact des conditions de travail.
Dans une note d’étape d’une dizaine de pages adressée au Premier ministre le 19 octobre dernier et dont Santé & Travail a pu prendre connaissance, les trois experts de la mission sur les arrêts maladie font part de leur premier diagnostic et formulent dix recommandations. Jean-Luc Bérard, directeur des ressources humaines du groupe Safran, Stéphane Oustric, professeur de médecine générale, et Stéphane Seiller, conseiller-maître à la Cour des comptes et ancien directeur des Risques professionnels de l’Assurance maladie, évoquent les deux principales causes de la hausse des dépenses relatives aux arrêts de travail : d’une part, celle-ci est due conjoncturellement à « l’augmentation de la masse salariale du secteur privé » ; d’autre part, elle est la conséquence de « l’augmentation du taux d’activité des seniors, consécutive, notamment, au recul de l’âge de la retraite depuis le début de la décennie, et à la poursuite de l’augmentation du nombre de trimestres cotisés pour bénéficier du taux plein ». « A cet égard, écrivent les rapporteurs, nous avons partagé avec l’ensemble de nos interlocuteurs le fait que les conditions de travail ont certainement un impact sur le nombre d’arrêts de travail, et que l’intensification du travail peut participer dans la longue durée à l’augmentation tendancielle des dépenses. » Mais ils précisent que ces facteurs ne sont pas la cause des évolutions récentes.
« Permettre un retour plus rapide au travail »
La mission invite aussi à distinguer les arrêts de longue et de courte durée, « dont les impacts sont très différents ». Ainsi, en 2017, les arrêts de moins de 7 jours représentaient 44 % du nombre total d’arrêts, mais seulement 4 % de la dépense indemnisée par l’Assurance maladie. Pour les arrêts de moins de 15 jours, on passe à 60 % du nombre total et à 9 % de la dépense ; pour les arrêts de moins de 30 jours, on est à 74 % et 18 %. « Les arrêts courts ne sont donc pas principalement un enjeu de dépenses, considèrent les auteurs, mais ils ont un impact sur l’organisation du travail dans les entreprises. Il faut également savoir que la France se situe dans la moyenne des pays européens. »
En revanche, si les arrêts longs sont en proportion peu nombreux, ils concentrent les coûts d’indemnisation pour l’Assurance maladie : les arrêts de plus de 6 mois ne représentent que 7 % du nombre d’arrêts mais 44 % de la dépense. Et surtout, il est établi qu’un salarié arrêté plus de 6 mois perd 50 % de chances de retrouver son travail, voire un travail. Pour les rapporteurs, un constat s’impose donc : il faut « agir pour permettre un retour plus rapide au travail, dès que l’état de santé du salarié le permet, doit être un objectif central des politiques publiques, dans l’intérêt des personnes, des entreprises et de l’économie, et de celui du système d’assurance maladie ».
Parmi les leviers d’action, la prévention de la désinsertion professionnelle « doit désormais devenir un objectif prioritaire », affirment les experts, qui préconisent aussi l’amélioration des conditions de travail.
Ouvrir la possibilité d’un temps partiel thérapeutique, sans arrêt à temps complet préalable, et rendre obligatoire l’utilisation du système dématérialisé d’avis d’arrêts de travail sont deux mesures proposées par la mission qui ont déjà été inscrites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2019.