Nuit debout pour la santé au travail
Le 30 avril, le travail et ses effets délétères sur la santé ont été au cœur des échanges organisés place de la République, à Paris, par le collectif Nuit debout.
Né de la mobilisation contre la loi El Khomri, le mouvement Nuit debout devait un jour ou l’autre faire sa place au thème de la santé au travail. Ce fut le cas à Paris le 30 avril, un mois après son lancement. « Cela n’était pas une évidence, estime Danièle Linhart, sociologue et directrice de recherches au Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Le mouvement de la place de la République ne met pas le travail au cœur de ses préoccupations, lesquelles sont davantage effervescentes, autour d’enjeux civiques et politiques plus généraux, comme les réfugiés, l’écologie… Le travail est perçu comme la propriété du syndicat organisé, moins stimulant. »
Elle a répondu présente à l’atelier sans hésiter, « dans la continuité des états généraux de la santé au travail monté autour du collectif Pour ne pas perdre sa vie à la gagner », porté notamment par Eric Beynel, codélégué général de Solidaires. Marie Pascual et Alain Carré, anciens médecins du travail, Annie Thébaud-Mony, sociologue et directrice de recherches honoraire à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), ainsi que bien d’autres experts de la question se sont également retrouvés place de la République la veille de la Fête du travail, pour débattre des effets délétères de celui-ci.
Harcèlement et perte de sens du travail
« 80 % des personnes présentes dans l’assemblée ne seraient jamais entrées dans un colloque organisé dans une université, même si c’était gratuit ! », s’enthousiasme Rachel Saada, membre du Syndicat des avocats de France et spécialiste en droit du travail. « Les principales préoccupations concernaient le harcèlement et de la perte de sens du travail, indique Serge Volkoff, statisticien et ergonome au Centre de recherches sur l’expérience, l’âge et les populations au travail (Creapt). Parmi les témoignages, on a beaucoup entendu de comparaisons entre le public et le privé, montrant qu’une logique de concurrence a pris le dessus partout. »
Au rang des pistes de réflexion figure un recours plus fréquent aux services de santé au travail, « malgré les manques d’effectifs et les atteintes à leur indépendance », souligne Serge Volkoff, ainsi qu’à des outils tels que le CHSCT. L’organisation d’un prochain atelier sur la thématique est envisagée, pour l’heure sans davantage de précisions.
DEUX AIDES DE LA SÉCU POUR PRÉVENIR LES TMS
La direction des Risques professionnels de l’Assurance maladie a lancé deux aides financières pour soutenir les très petites, petites et moyennes entreprises dans leur démarche de prévention des troubles musculo-squelettiques (TMS), qui restent les premières maladies professionnelles reconnues en France. Les sociétés de moins de 50 salariés, non soumises à la mise en place d’un CHSCT et souvent dépourvues de préventeurs en leur sein, peuvent dès à présent prétendre à ces deux chèques, dont le montant peut atteindre 25 000 euros chacun. Elles ont jusqu’au 15 juillet 2017 pour les réserver auprès de leur caisse régionale.
10 millions d’euros
La première aide, TMS Pros diagnostic, est destinée à « identifier et maîtriser les risques de TMS » ; elle permet de financer 70 % de la formation d’un salarié ou de sous-traiter une étude ergonomique des situations de travail qui doit se traduire par un diagnostic et l’élaboration d’un plan d’action. La seconde, TMS Pros action, est attribuée en vue d’« agir concrètement et durablement contre les TMS » ; elle permet de financer 50 % de l’achat de matériel ou d’équipements pour réduire les contraintes physiques (notamment lors de manutentions manuelles de charges, d’efforts répétitifs ou de postures contraignantes) et elle peut être utilisée pour mettre en place des formations adaptées. Car, « au-delà des conséquences lourdes pour les salariés, les TMS sont aussi très coûteux pour les entreprises : près d’un milliard d’euros en 2014 », rappelle un communiqué de presse de l’Assurance maladie daté du 3 mai. Disposant d’une enveloppe de 10 millions d’euros jusqu’à fin 2017, sa branche accidents du travail et maladies professionnelles pourra financer plus de 400 aides TMS Pros.
– L’enquête de La Croix sur des médecins généralistes, témoins de l’usure physique et psychologique du travail dans un contexte où la Sécurité sociale entend réguler la durée et le nombre d’arrêts maladie.
– Neuf salariés racontent leur « job à la con » sur le site de L’Obs.