"On doit en faire deux fois plus qu'un homme"

avril 2016

Témoignage de Sophie Duquesne, secrétaire de CHSCT et élue DP et CE chez Radio Frequency Systems (RFS) France.

"Comme toute femme dans une entreprise majoritairement masculine, il n'a pas été facile de se faire une place en tant que représentante du personnel. Et puis, comme pour tout poste à responsabilité, on doit en faire deux fois plus, pour montrer qu'on peut représenter les collègues aussi bien qu'un homme. Au bout de quatorze ans de mandat, je fais un peu partie du paysage, mais le message n'était pas toujours clair au début. Je me rappelle quelqu'un de mon organisation syndicale qui m'avait sollicitée pour intervenir sur un événement en me disant : "Ce serait bien que tu viennes parce qu'en plus t'es une femme." Je lui avais répondu : "Si c'est uniquement pour ça que tu veux que je vienne, cela ne m'intéresse pas. Si c'est parce que je suis une bonne militante, d'accord !"

La répartition des tâches entre élus s'effectue avant tout en fonction des capacités et des savoir-faire. Mais du fait de mon emploi d'assistante logistique, j'avais la maîtrise de l'outil informatique, ce qui n'était pas forcément le cas des autres, et donc au départ j'étais surtout sur les tâches administratives. Je le comprenais, mais parfois j'en avais marre.

La proportionnalité hommes/femmes sur les listes électorales, prévue par la loi Rebsamen, c'est louable, mais ce sera compliqué. Il ne s'agirait pas de forcer la main aux femmes : si elles ne veulent pas s'investir sur un mandat, elles le vivront comme un fardeau. Les réunions qui débordent en fin de journée, la difficulté à déconnecter quand on rentre chez soi, les jours de repos où on doit revenir au travail... tout cela n'est pas forcément compatible avec leur vie de famille.

Il faudrait que les femmes aient une reconnaissance dans l'entreprise. Déjà, elles doivent se battre pour obtenir l'égalité au travail avec les hommes. Et en matière de discrimination, la peine est double pour celles qui s'engagent sur un mandat. Quand j'en ai pris un, mon chef m'a dit : "Tu fais un drôle de choix de carrière..."