Pénibilité : où sont passés les rayonnements ionisants ?
Les radiations ionisantes ont disparu du décret « pénibilité » publié le 30 mars dernier. Elles figuraient bien pourtant dans la liste des facteurs de risque de pénibilité présentée pour avis aux partenaires sociaux le 23 février dernier.
En catimini. Le gouvernement a discrètement retiré les rayonnements ionisants de la liste des expositions aux cancérogènes pouvant ouvrir droit à une retraite anticipée, dans le dernier décret sur la pénibilité paru le 30 mars dernier. C'est la fédération CGT de l'énergie qui a découvert le pot aux roses et qui le dénonce dans un communiqué de presse publié ce matin. « Farce ? Pour le gouvernement, l'exposition aux rayonnements ionisants n'est plus cancérogène », titre avec humour le communiqué.
La CGT voit dans ce retrait la « conséquence d'un formidable lobbying exercé par les industriels du nucléaire, au moment même où le monde entier s'interroge sur la santé de ces travailleurs qui interviennent sur le site de Fukushima ».
Pourtant, dans la version du décret présentée pour consultation, le 23 février dernier, à la commission « accidents du travail-maladies professionnelles » de la Caisse nationale d'assurance maladie, l'exposition aux rayonnements ionisants était bien mentionnée. Absente de la première rédaction, elle avait été ajoutée à la demande des organisations syndicales.
Pour Michel Lallier, qui siège pour la CGT au Haut Comité de la transparence du nucléaire, la décision du gouvernement de la retirer « est d'autant plus incompréhensible que le risque de développer un cancer ou une leucémie pour les travailleurs du nucléaire exposés aux rayonnements ionisants aux limites réglementaires est supérieur à celui encouru par d'autres salariés exposés dans les mêmes conditions à d'autres substances cancérogènes qui, elles, figurent bien dans le décret pénibilité ».
Le communiqué de presse de la CGT indique d'ailleurs plusieurs références bibliographiques du Circ (Centre international de recherches sur le cancer) et de l'InVS (Institut de veille sanitaire) relatives à des études épidémiologiques confirmant sa thèse. Il rappelle aussi que 320 000 salariés en France sont exposés aux rayonnements ionisants, dans l'industrie nucléaire, mais aussi dans l'industrie non nucléaire et dans le secteur médical.
Interrogé en début de matinée par Santé & Travail, le cabinet du ministre du Travail, Xavier Bertrand, explique que « les rayonnements ionisants ne faisaient par partie de la liste des facteurs de pénibilité sur laquelle les partenaires sociaux étaient tombés d'accord en septembre 2008. Du point de vue de la prévention (NDLR : le décret prévoit également un volet prévention pour les facteurs de risque de pénibilité), il existe déjà un dispositif conséquent de traçabilité des expositions pour les rayonnements ionisants.»
Dont acte. Mais sur le volet réparation de la pénibilité, sur lequel les attentes sociales sont les plus fortes, le cabinet du ministre n'a toujours pas d'explication à apporter à l'heure où nous publions cet article.