Les perturbateurs endocriniens font toujours débat
Alors que le Parlement européen s’apprête à voter sur la définition des perturbateurs endocriniens proposée par la Commission européenne, certains députés affichent déjà leur opposition. Et plusieurs études viennent confirmer leur dangerosité.
Ça chauffe pour les perturbateurs endocriniens (PE) ! Fin septembre, la commission environnement du Parlement européen s’est opposée à la définition de ces substances proposée par la Commission européenne, critiquée par certains milieux scientifiques. Les députés contestent notamment le statut dérogatoire accordé à certains insecticides. Cette objection influencera-t-elle le vote en session plénière du Parlement, pour ou contre cette définition, qui doit avoir lieu demain mercredi 4 octobre ? A voir. Evénement plutôt rare, des lobbyistes de Monsanto se sont vu également récemment refuser l’accès au Parlement, suite à une décision de ce dernier.
Effet cocktail
Enfin, autre élément de nature à peser dans le débat, trois nouvelles études scientifiques alertent à leur tour sur l’impact potentiel des PE sur la santé, notamment sur celle des femmes enceintes et de leur enfant à naître. Deux d’entre elles ont été publiées dans la revue Environmental Health Perspectives. La première montre un effet cocktail lié à des expositions multiples à différentes molécules, perturbant la production de testostérone chez l’embryon. Cette exposition simultanée à plusieurs PE exacerbe les effets de chaque molécule entre 10 à 10 000 fois, selon la nature du mélange… Plusieurs molécules d’usage industriel, onze au total, sont concernées par cet effet cocktail, dont le fameux bisphénol A, le clomifen ou la theophylline d’usage pharmaceutique, ou encore les pesticides chlordecone, imazalil, propiconazole, bitertanol, prochloraz.
La seconde étude montre que l’exposition pendant la grossesse à certains phénols et phtalates (contenus notamment dans les pesticides) provoque des troubles du comportement chez les enfants. Les chercheurs ont comparé l’imprégnation des mères par certaines molécules très tôt pendant leur grossesse et le comportement de leurs garçons âgés de 3 à 5 ans. Les enfants dont les mères ont été exposées au bisphénol A montrent des troubles émotionnels à 3 ans et des comportements de type hyperactif à 5 ans. Parmi les 11 phtalates étudiés, le di-n-butyl (DBP) est le plus préoccupant, car il coïncide avec des comportements de repli.
Enfin, la dernière étude, américaine et publiée le 29 août dans la revue Nature, établit que les femmes qui vivent dans un environnement pollué par les pesticides ont plus de risques d’accoucher prématurément (+ 8 %) et que leur enfant présente des anomalies congénitales (+ 9 %). Pour rappel, en 2015, le CHU de Montpellier a montré que les femmes exposées pendant la grossesse à différents polluants (solvants, détergents et pesticides...) ont un risque nettement accru d'avoir des garçons atteints de malformations génitales. L'étude listait des professions à risque : activité de nettoyage/ménage, coiffeuse, esthéticienne, travail en laboratoire...
DES CAISSES DE LIDL À LA CASSE SOCIALE
Mardi 26 septembre, en prime time, l’émission Cash investigation dénonçait les conditions de travail dans l’enseigne de grande distribution Lidl et chez l’opérateur de téléphonie/Internet Free. L’équipe de France 2 a ainsi fait embaucher un de ses journalistes comme préparateur de commandes chez Lidl, équipé d’une caméra cachée et d’un cardiofréquencemètre. La vidéo révèle l’intensité des tâches de manutention et la charge de travail du fait de la commande vocale automatisée. « Sur le plan cardiaque et le plan ostéo-articulaire, le poste est intenable à moins de sacrifier sa santé », estime Alain Garrigou, chercheur au département hygiène-sécurité-environnement (HSE) de l’IUT de Bordeaux, qui a interprété les données collectées par le journaliste (voir la séquence). Le taux de gravité des accidents de travail est trois fois plus élevé chez Lidl que la moyenne du secteur. Usés, les salariés se retrouvent rapidement inaptes à leur poste, avant d’être licenciés, comme le montre l’émission, qui aura réuni 3,8 millions de téléspectateurs.
A LIRE AILLEURS SUR LE WEB
La branche accidents du travail-maladies professionnelles de l’Assurance maladie a publié son rapport 2016. Celui-ci décompte 626 227 accidents du travail en 2016 (contre 618 274 en 2013), soit une légère hausse. La fréquence globale des accidents du travail baisse, mais ce n’est pas le cas partout. Dans l’intérim, elle augmente de 7,8 %. Dans le secteur du soin et de l’aide à la personne, elle est trois fois plus élevée que la moyenne. Du côté des maladies professionnelles, le nombre de reconnaissances diminue : 48 762, contre 50 960 en 2015. Mais avec des évolutions contrastées selon les pathologies : + 40 % pour les troubles psychiques, + 10,1 % pour les cancers hors amiante, – 9,5 % pour ceux liées à l’amiante et – 4,1 % pour les troubles musculo-squelettiques (notamment pour ceux de l’épaule, suite à la refonte du tableau).