Pesticides : mauvaises combinaisons
Les combinaisons de protection contre les produits toxiques ne tiennent pas leurs promesses, laissant les travailleurs, agricoles notamment, exposés au risque. C'est ce que confirment des études présentées lors des rencontres scientifiques de l'Afsset.
Le 27 novembre dernier, le ministre du Travail, Xavier Darcos, a pris des arrêtés afin d'interdire la commercialisation de deux modèles de combinaisons de type 4 (étanches aux pulvérisations). Cette décision fait suite à l'alerte lancée il y a deux ans et demi par deux chercheurs de l'université de Bordeaux, Alain Garrigou et Isabelle Baldi, sur l'exposition de salariés agricoles aux produits phytosanitaires. Dans une étude, ces deux chercheurs avaient remis en question l'efficacité des vêtements censés protéger les travailleurs contre les produits chimiques toxiques, dont les produits cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR). Révélée par Santé & Travail1 , cette étude avait incité la direction générale du Travail à lancer une campagne de surveillance du marché, confiée à l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset), qui a conduit à l'interdiction prononcée par le ministère.
Le but de cette première campagne était de procéder à un contrôle de conformité, en vérifiant le bon niveau de protection des vêtements par rapport à des substances pures. Les résultats n'ont pas été à la hauteur des attentes. La plupart des combinaisons testées étaient non conformes et les renseignements portés sur la notice d'utilisation étaient parfois fort éloignés de la réalité en matière de protection assurée. Seules deux combinaisons étanches aux projections de liquides et à la pénétration par brouillard (type 3) ont tiré leur épingle du jeu et s'avèrent protectrices.
Une seconde phase de tests a consisté à tester la résistance de ces combinaisons à la perméation des produits chimiques réellement utilisés dans différents secteurs d'activité : acétone, formaldéhyde, diéthylamine, white-spirit, herbicides, fongicides, insecticides, huiles minérales et peintures aqueuses.
Les résultats, rendus publics le 8 décembre à l'occasion des rencontres scientifiques santé-travail organisées à Paris par l'Afsset, confirment que les vêtements de protection de type 3 sont plus protecteurs que ceux de type 4, dont l'utilité semble du coup contestable. De surcroît, l'étude de l'Afsset montre qu'il n'existe pas d'équipements polyvalents, capables de protéger contre tous les produits chimiques. Ce résultat milite pour un choix adapté du vêtement, en fonction d'un produit chimique précis. Il devrait également commander que les fiches de données de sécurité des produits soient explicites quant à la nature des protections individuelles qu'ils requièrent.
Maladie de Parkinson
Avant tout, l'ensemble de ces travaux confirme que la protection individuelle n'est pas la panacée et qu'il est nécessaire d'envisager en priorité la substitution des produits toxiques par d'autres qui le sont moins. Cela est particulièrement vrai dans l'agriculture. Présentée lors des rencontres de l'Afsset par Alexis Elbaz, de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), une étude a mis en évidence une relation entre l'exposition aux insecticides organochlorés et la maladie de Parkinson. Le risque de survenue de cette pathologie neurodégénérative est proportionnel au nombre d'années d'exposition. Ces recherches ont également montré une fréquence plus importante de la maladie de Parkinson chez les agriculteurs de certains cantons où la culture des arbres fruitiers était dominante. Or, si en 1998 les vergers ne représentaient en France que 1 % de la surface agricole utile, ils ont " absorbé " la même année 21 % des ventes d'insecticides. De quoi inquiéter les agriculteurs concernés, surtout si leurs combinaisons sont poreuses...
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Santé & Travail n° 59, juillet 2007, page 6.