Une pratique médicale non reconnue
Les plaintes d'employeurs à l'encontre de certificats sur la santé au travail ont mis en lumière une forte contradiction entre les règles énoncées par le Conseil national de l'ordre des médecins (Cnom) concernant ces écrits et les spécificités de l'exercice de la médecine vis-à-vis des pathologies professionnelles. Selon le Cnom, un certificat a une valeur juridique et ne peut viser que des faits constatés par le médecin, en étant très prudent dans la rédaction. C'est l'opposé de ce qui est demandé à un médecin quand il doit établir un certificat afin de faire reconnaître l'origine professionnelle d'une pathologie, notamment psychique. Dans ce cas, "il doit prendre en compte des éléments d'exposition qui lui sont rapportés", explique Philippe Davezies, enseignant-chercheur en médecine et santé au travail. Le praticien doit se prononcer sur le lien de causalité avec le travail et mobiliser, pour cela, ses capacités d'analyse, mais aussi sa propre subjectivité. "S'il entend respecter les principes du Conseil de l'ordre, aucun médecin du travail ne pourrait lancer une procédure en vue d'une reconnaissance d'une dépression en maladie professionnelle", estime Philippe Davezies, qui dénonce "une insuffisante prise en compte des questions de santé au travail par les garants de la déontologie".