Le préjudice d'anxiété revu et corrigé
Le 5 avril, l'assemblée plénière de la Cour de cassation a changé son fusil d'épaule au sujet du préjudice d'anxiété, dans un arrêt (n° 18-17442) largement publié et commenté. On se souvient qu'en 2010 la Haute Juridiction avait reconnu un préjudice d'anxiété pour des salariés exposés à l'amiante (Cass. soc. n° 09-42241, 11 mai 2010). Mais cinq ans plus tard, elle avait strictement limité cette reconnaissance aux seuls salariés dont l'entreprise était inscrite sur la liste réglementaire ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata) (Cass. soc. n° 13-26175, 3 mars 2015). Un premier revirement de jurisprudence très critiqué par la doctrine mais qui restera constant.
Prouver l'exposition
L'arrêt d'avril dernier constitue une nouvelle volte-face. Il admet en effet la reconnaissance du préjudice d'anxiété pour des travailleurs ayant été exposés à l'amiante, que leur entreprise entre ou non dans le champ de l'Acaata. Cependant, alors qu'à l'origine il y avait une quasi-présomption d'imputabilité, les salariés devront faire la preuve de leur exposition et du préjudice subi, selon les règles civiles. Au-delà de l'amiante, cet arrêt pose la question d'un préjudice d'anxiété lié aux expositions à d'autres produits dangereux, susceptibles d'entraîner l'apparition de cancers. La Cour de cassation devra y apporter une réponse prochainement puisque, le 20 juin, elle a examiné un pourvoi de plusieurs centaines de mineurs exposés à des produits cancérogènes autres que l'amiante. Une décision très attendue et pour laquelle l'avocat général a déjà demandé le rejet.