Le projet de fusion IRSN-ASN réactivé
Au printemps dernier, le projet de fusion de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) avait été retoqué par le Parlement. En juillet, l’Elysée, pressé de relancer la filière de l’atome, profitait d’un Conseil de politique nucléaire pour réactiver son projet controversé. Début septembre, la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, a présenté à l’intersyndicale de l’IRSN son projet de loi de création d’une grande autorité indépendante de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. Sans convaincre : « L’absence de réponses à nos préoccupations nous conforte hélas dans notre position ! », ont déclaré les représentants du personnel à l’issue de la réunion. Outre l’impact social avec 200 salariés concernés sur 1 700, l’intersyndicale déplore le « risque de pertes de synergies entre experts de la sûreté, de la sécurité et de la radioprotection » qui en résultera.
« La ministre nous a indiqué que plusieurs services de l’IRSN ne rejoindront pas la future grande autorité », explique François Jeffroy, délégué CFDT. Ce dernier liste en particulier l’expertise de la sûreté des installations nucléaires relevant de la Défense nationale, l’expertise de la sécurité des installations nucléaires civiles, c’est-à-dire la prévention de la malveillance, des agressions et des attentats contre les installations nucléaires, ou encore l’activité de prestation de dosimétrie externe, à savoir la fabrication, vente et exploitation des données des appareils mesurant la radioactivité reçue par une personne exposée professionnellement. Les activités de recherche de l’IRSN devraient être transférées dans la future grande autorité. « Le projet de loi n’intègre aucune garantie sur la séparation des fonctions “expertise-recherche” et “décision-contrôle” », déplore l’intersyndicale. Or la robustesse du système français actuel de contrôle des risques nucléaires repose précisément sur cette organisation bicéphale, garante, selon eux, de l’indépendance du pôle d’expertise.
L’embryon de projet de loi révèle surtout l’extrême complexité de la réorganisation imposée par le gouvernement s’agissant de la fusion entre deux organismes aux statuts si différents. Un chantier qui devrait prendre plusieurs années. « On va fabriquer une usine à gaz pour faire à peu près aussi bien qu’aujourd’hui ! », redoute François Jeffroy. Prochaine échéance : une phase de consultation informelle qui débutera très prochainement, le projet de loi devant être présenté au Conseil des ministres fin novembre et transmis au Parlement en décembre ou au début de l’année prochaine.