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Quelle santé au travail après les élections législatives ?

par Rozenn Le Saint / 26 juin 2024

Retraite, pénibilité, réforme de l’assurance chômage… Les questions en lien avec la santé au travail sont parfois abordées, souvent oubliées, dans les programmes des principales coalitions politiques candidates aux élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet. Décryptage.

La dernière réforme des retraites est l’un des sujets suscitant le plus de réactions parmi les forces politiques en perspective du scrutin législatif. Sans surprise, la majorité sortante, regroupant Renaissance, Horizons, le MoDem, le Parti radical et l’UDI sous la bannière « Ensemble pour la République », n’entend pas revenir sur le recul de deux ans de l’âge de départ. Engagé dans la bataille des législatives, Emmanuel Macron a simplement précisé que les pensions « seront bien indexées sur l’inflation », ce que prévoit d’ailleurs le code de la Sécurité sociale. Pas de proposition non plus du côté des Républicains (LR). 
Si jusqu’alors le Rassemblement national (RN) plaidait en faveur d’une abrogation du texte ayant porté l’âge de la retraite à 64 ans, le président du parti d’extrême droite a déclaré qu’il ne s’agissait plus d’une priorité mais plutôt d’une mesure à penser « à partir de l’automne ». Il a précisé que le RN reviendrait en premier lieu sur la réforme pour les personnes ayant commencé à travailler avant 20 ans, avec une possibilité de départ à 60 ans à la condition d’avoir cumulé 40 années de cotisations. Pour les autres, une progressivité serait mise en œuvre avec un âge légal de 62 ans et un nombre d’annuités allant jusqu’à 42 ans de cotisations. La prise en compte de la pénibilité n’est à aucun moment mentionnée dans le programme du RN. 

Retraite à 62 ou 60 ans en fonction de la pénibilité

Le programme le plus fourni en matière de santé au travail est indéniablement celui du Nouveau Front populaire (NFP), qui regroupe Europe Ecologie-Les Verts (EELV), La France insoumise (LFI), le Parti communiste français (PCF), le Parti socialiste (PS), avec le soutien de Place publique, Génération·s ou encore du NPA-Anticapitaliste. 
Le NFP entend notamment abroger la réforme des retraites de 2023, et ce dans les 15 premiers jours de son mandat, pour revenir à un âge d’ouverture des droits à une pension à 62 ans. A plus long terme, il souhaite « réaffirmer l’objectif commun du droit à la retraite à 60 ans ». Une formule floue pour une limite d’âge qui divise au sein de cette alliance des gauches. Dans un premier temps, l’idée serait de légiférer afin que les personnes ayant accompli un métier physiquement éprouvant puissent partir à l’âge de 60 ans. L’union des gauches souhaite d’ailleurs « rétablir les facteurs de pénibilité supprimés par Emmanuel Macron » ou encore « prendre en compte le RSA pour valider des trimestres en vue de la retraite ». Le NFP a l’intention d’organiser une « conférence nationale sur le travail et la pénibilité », avec l’objectif de promouvoir le passage aux 32 heures hebdomadaires pour les « métiers pénibles ou de nuit ».  
La coalition de gauche propose d’autres mesures destinées à améliorer les conditions de travail et la prévention. Elle est par exemple favorable au rétablissement des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), dont la disparition a entraîné un affaiblissement du dialogue social sur les questions de santé au travail. Elle défend la reconnaissance du burn-out en maladie professionnelle ou, dans un autre registre, la création d’un congé menstruel dans toutes les entreprises et administrations. Enfin, les partis de gauche souhaitent qu’un tiers des sièges du conseil d’administration des entreprises soit réservé aux salariés afin de leur donner davantage de pouvoir.

La réforme chômage en ligne de mire

Deuxième réforme entreprise par le président de la République qui cristallise les positions, celle de l’assurance chômage. Le gouvernement ambitionne que le décret soit « pris d’ici au 1er juillet », soit entre les deux tours du scrutin, pour une entrée en vigueur au 1er décembre. Le texte prévoit une durée d’indemnisation réduite de 18 à 15 mois, la nécessité d’avoir travaillé huit mois sur les 20 derniers pour être indemnisé, contre six mois au cours des 24 derniers mois actuellement. 
Si LR n’entend pas revenir sur ces nouvelles contraintes d’indemnisation pour les personnes privées d’emploi, le RN dénonce de son côté « un véritable coup de massue pour les Français » et déplore que « les premiers stigmatisés [soient] les cadres qui ne représentent pourtant que 5 % des bénéficiaires des allocations-chômage, alors qu’ils cotisent pour 45 % des recettes de l’Unedic ». Le Nouveau Front populaire va encore plus loin puisqu’il souhaite supprimer les trois réformes de l’assurance chômage successivement poussées par le camp présidentiel. 
La première organisation syndicale de France, la CFDT, a incité à opter pour « tout sauf l’extrême droite », sans toutefois donner de consigne de vote précise. Au-delà d’appeler à faire barrage contre l’extrême droite, la CGT, deuxième force syndicale, a explicitement appelé à voter pour le Nouveau Front populaire, tout comme la FSU et plusieurs syndicats de Solidaires. Selon la CGT, ce programme est « celui qui répond le mieux aux attentes et aspirations des travailleuses et des travailleurs et qui ouvre le plus de possibilités de mobilisations gagnantes ». A l’inverse, les organisations patronales Medef et CPME ont exprimé un rejet des propositions du NFP et du RN.

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