La recette d'une vraie formation à la sécurité
Trop souvent traitée comme une simple formalité administrative, la formation à la sécurité demeure une obligation légale et un élément clé de la prévention des risques. Elle constitue donc un enjeu pour les salariés. Voici quelques conseils pour la rendre plus efficace.
La formation des salariés à la sécurité est essentielle à la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. Et les partenaires sociaux dans les entreprises, comme les organismes en charge des questions de santé au travail, ont un rôle important à jouer dans sa mise en place. Ils peuvent commencer par veiller au respect par l'employeur des obligations qui sont les siennes en la matière. Ces obligations sont définies dans plusieurs articles du Code du travail. Tout employeur doit ainsi organiser une formation pratique à la sécurité pour les travailleurs qu'il embauche, pour ceux qui changent de poste de travail ou de technique et pour les salariés temporaires (art. L. 4141-2). Ces derniers doivent bénéficier d'une formation renforcée en cas de risques particuliers (art. L. 4154-2). Une formation peut être aussi prodiguée à des travailleurs reprenant leur activité après un arrêt de travail d'une durée d'au moins vingt et un jours, et ce à la demande du médecin du travail.
Adaptée aux risques et aux salariés
La formation doit porter sur les conditions de circulation dans l'entreprise et d'exécution du travail propres à garantir la sécurité des salariés. Elle doit aussi traiter de la conduite à tenir en cas d'accident ou de sinistre (art. R. 4141-3). Elle doit être adaptée au niveau de formation, de qualification, d'expérience professionnelle du travailleur appelé à en bénéficier et être réalisée dans la langue parlée ou lue par ce dernier (art. R. 4141-5). Le temps qui y est consacré est considéré comme temps de travail et la formation se déroule pendant l'horaire normal de travail.
Si l'organisation des formations est de la responsabilité des employeurs, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) doit pouvoir participer à leur préparation (art. R. 4143-1). Et le programme de formation, sur lequel les élus du comité d'entreprise sont consultés chaque année, doit mentionner les formations à la sécurité organisées dans l'entreprise. Selon les risques constatés, les organismes professionnels d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et les services de prévention des caisses régionales d'assurance maladie (Cram) peuvent être également sollicités pour conduire des actions particulières de formation à la sécurité, notamment dans les établissements ne bénéficiant pas d'une représentation du personnel.
Comme on le voit, la législation est fournie. Mais qu'en font les entreprises ? Pas grand-chose. De nombreux salariés témoignent du fait qu'ils n'ont pas eu de formation depuis très longtemps, voire jamais. La situation des salariés temporaires et/ou précaires est particulièrement dramatique. Nombreux sont ceux qui accèdent à leur poste de travail sans aucune formation. Les juges sont régulièrement amenés à sanctionner des chefs d'entreprise suite à des accidents du travail. Des secteurs entiers ignorent leurs obligations en matière de formation à la sécurité. D'autres, comme le tertiaire, considèrent même qu'il n'y a pas lieu d'en faire. Pourtant, n'y a-t-il pas dans ce secteur de port de charges lourdes, de déplacements, de risques électriques... ?
Quand il y a des formations, celles-ci s'avèrent souvent inefficaces, car organisées dans une logique purement administrative par les employeurs, afin de se couvrir légalement. Certaines entreprises affichent ainsi des plans de formation non réalisés, les salariés étant invités à émarger une fiche. Des formations " clés en main " sont très souvent mises en oeuvre sur certains problèmes de sécurité, sans s'interroger sur leur adaptation à la réalité du terrain. Manquant de moyens, les services de prévention des Cram touchent un nombre très restreint d'entreprises et ne peuvent leur consacrer que peu de temps. L'absence de représentation syndicale favorise également cette situation.
Un devoir de résultat
Pourtant, les employeurs sont soumis à une obligation de résultat, et non pas seulement de moyens, vis-à-vis des formations à la sécurité. Celles-ci doivent permettre d'éviter les risques, de les combattre à la source, de tenir compte de l'évolution des techniques... Il s'agit de donner aux salariés les informations qui leur permettront de ne pas être exposés au risque, plus que de définir les bons ou mauvais comportements face à ce dernier. Les salariés ne peuvent en effet porter seuls l'entière responsabilité de leur sécurité et de leur santé. Ils ne peuvent être acteurs de leur propre sécurité que s'ils sont valablement informés des risques auxquels ils sont exposés, ce qui est rarement le cas.
Pour être efficace, une formation à la sécurité doit donc être élaborée à partir d'une véritable évaluation des risques, menée sur la base des situations de travail réelles et tenant compte de leur variabilité. A défaut, ses préconisations risquent d'apporter des contraintes trop importantes dans la réalisation du travail et de ne pas être appliquées. Il est de ce fait nécessaire que les salariés comme les membres du CHSCT soient associés à l'élaboration de la formation. Cette dernière doit aussi tenir compte du contenu des différents documents traitant de la sécurité et de la santé au travail : rapport annuel, document unique, programme annuel.
Enfin, la méthode employée pour animer la formation conditionne sa réussite. Le formateur devra privilégier le mode participatif, en alternant les moments en salle et ceux sur le terrain, pour réfléchir collectivement aux solutions les plus appropriées. La formation à la sécurité doit faire l'objet d'une adaptation permanente, car le travail change. Aussi doit-elle rester un espace d'échanges. Elle permettra ainsi de déceler d'éventuels problèmes organisationnels, facilitant en retour leur prise en charge par les partenaires sociaux et, donc, le travail de prévention.