Rude combat pour le maintien dans l’emploi
Les troubles musculosquelettiques représentent plus de la moitié des pathologies ayant causé un arrêt maladie, selon l’édition 2020 de l’étude « Arrêts de travail et maintien dans l’emploi », réalisée dans les Hauts-de-France. Avec des pistes pour prévenir la désinsertion professionnelle.
C’est un changement de perspective qu’ont entrepris l’Institut de santé au travail du nord de la France (ISTNF) et le réseau régional Santé, travail, maintien dans l’emploi (STME). Pendant plus d’une dizaine d’années, ils ont réalisé des études sur les situations d’inaptitude médicale, avec l’aide de l’université de Lille et de médecins du travail des Hauts-de-France. « Au fil des années, les mêmes constats revenaient, avec le maintien dans l’entreprise de seulement 4 % des salariés après une inaptitude, explique Véronique Buewaert, médecin coordonnateur du réseau STME. Ces chiffres ne valorisaient pas les actions menées par les médecins du travail, notamment en termes de propositions d’aménagements de postes. »
Des maladies liées au travail
Alors en 2020, plutôt que d’aborder cette question sous l’angle de l’inaptitude, l’étude s’est focalisée sur le maintien dans l’emploi après un arrêt maladie de plus de 30 jours. Les données ont été recueillies par les médecins du travail auprès des salariés vus en visite de reprise1
. « Les précédentes avaient permis de cibler les secteurs d’activité et les profils des salariés plus porteurs d’inaptitudes afin de définir des axes d’amélioration pour la prévention, précise Mireille Surquin, responsable de projet à l’ISTNF. L’objectif de l’édition 2020 était d’analyser les causes des arrêts de travail de plus de 30 jours et leurs conséquences sur le maintien dans l’emploi. Avec toujours le même but, celui d’identifier des leviers pour empêcher la désinsertion professionnelle. »
Comme les années antérieures, l’enquête 2020 montre la prédominance des pathologies ostéoarticulaires : elles représentent la majorité des cas (54,7 %) parmi les salariés reçus par les médecins du travail en visite de reprise. Suivent les troubles mentaux et du comportement (20 %), dont la moitié pour souffrance au travail. La pathologie ayant causé l’arrêt est liée au travail dans 40 % des cas, avec des contraintes subies comme la manutention, les postures pénibles, les gestes répétitifs, la station debout prolongée, la pression temporelle et la pression psychologique. « Il est essentiel d’agir en prévention sur les situations et les organisations de travail dans les entreprises, d’intervenir en amont sur ces contraintes qui sont des sources d’altération de la santé ou demeurent lors de la reprise après un arrêt de travail », souligne Mireille Surquin.
L’importance d’une visite de pré-reprise
Autre fait préoccupant révélé par l’étude ? Plus de 70 % des salariés n’ont pas bénéficié de visite de pré-reprise. Or, dans la moitié des visites de reprise, des problèmes sont constatés pour le retour au poste du salarié : 35 % se concluent par des propositions d’aménagement de poste, 11 % par une inaptitude médicale et 5 % par une réorientation vers la médecine de soin. Aux yeux de Véronique Buewaert, la visite de pré-reprise est importante « car elle permet une meilleure prise en charge par le médecin du travail avec des partenaires internes ou externes pour favoriser le maintien au sein de l’entreprise ou, s’il échoue, pour accompagner le salarié dans une reconversion professionnelle ».
Comme chaque année, tous les résultats sont inclus dans l’atlas régional de santé et travail des Hauts-de-France, édité par la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) et la direction régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi (Direccte). Voilà à disposition des acteurs concernés une série d’indicateurs clés pour tenter de faire reculer la désinsertion professionnelle.
- 1La crise sanitaire a bousculé la réalisation de l’étude : 2763 questionnaires standardisés, remplis par 131 médecins du travail pendant la première quinzaine de mars et le mois de septembre, ont été recueillis contre plus de 5000 en 2019. L’impact de la pandémie de Covid-19 sur des salariés qui auraient des arrêts prolongés en raison de séquelles sera analysé en 2021.