"Santé et liberté au travail sont corrélées"
Au cours de l'automne, près de 200 000 personnes ont répondu à "Parlons travail", vaste enquête interactive lancée à l'initiative de la CFDT1 . Céline Mardon, du Centre d'études de l'emploi et du travail, en analyse les premiers résultats.
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Voir aussi "Le travail reste un moyen d'épanouissement", Santé & Travail n° 97, janvier 2017.
En quoi l'enquête CFDT "Parlons travail" est-elle spécifique ?
Céline Mardon : "Parlons travail" présente des points communs avec d'autres enquêtes menées sur le sujet, puisqu'elle recueille des avis autodéclarés. Mais dans son cas, les participants sont particulièrement nombreux : 196 925 personnes ont répondu au questionnaire. Certes, les deux cinquièmes sont des adhérents de la CFDT, mais nous avons effectué des redressements pour obtenir une population représentative des salariés sur le plan sociodémographique.
Autre spécificité : le ton du questionnaire est direct, les formulations percutantes, parfois amusantes, en tout cas plutôt moins formelles que d'habitude, et on le remplit devant son ordinateur. Cela explique peut-être certaines différences dans les réponses par rapport à d'autres enquêtes. Par exemple, 55 % des salariés déclarent ici avoir le temps de faire correctement leur travail, contre 70 % dans l'enquête Sumer1 . Cela dit, la tendance reste à des niveaux assez élevés de satisfaction au travail : 58 % des salariés disent prendre souvent ou tout le temps du plaisir au travail et 76 % aimer leur travail. En revanche, certaines réponses aux questions plus originales nous ont parfois surpris. Notamment, la moitié des répondants reconnaissent avoir déjà eu envie de tout casser au travail.
Quels résultats vous ont le plus frappée ?
C. M. : La corrélation très forte entre les problèmes de santé liés au travail déclarés par les répondants et les formes de liberté dont ils disposeraient au travail. Ainsi, 53 % de ceux qui estiment ne bénéficier d'aucun soutien de leurs collègues ni de leur hiérarchie signalent avoir du mal à dormir à cause de leur travail, alors que ceux qui se sentent entourés sont 18 % à le dire. Ou encore, 13 % des "sans soutien" assurent qu'ils ne pourraient pas tenir dans leur travail sans médicaments, , contre 3 % des "soutenus". Et les troubles du sommeil liés au travail concernent 50 % de ceux qui affirment n'avoir pas choisi pour l'essentiel leur parcours professionnel, contre 26 % de ceux qui l'ont choisi. Sur les douleurs physiques liées au travail, c'est encore plus marqué. Et c'est valable pour toutes les facettes de la liberté au travail : avoir des marges de manoeuvre dans son activité individuelle, pouvoir s'exprimer sur son lieu de travail, etc.
Et de quoi dépend cette liberté ressentie au travail ?
C. M. : La liberté d'expression, en particulier, est très liée au sexe. 54 % des déclarants indiquent pouvoir à la fois s'exprimer librement sur leur lieu de travail et dire à leur responsable quand ils ne sont pas d'accord, tous âges confondus. Mais l'écart est de dix points entre hommes et femmes, qui sont les moins bien loties. Le fait de pouvoir compter sur de l'aide pour mener sa tâche à bien est, en revanche, fortement corrélé à l'âge : 50 % des 15-29 ans s'estiment aidés, contre 35 % chez leurs aînés. Ça, on s'y attendait moins. Enfin, du côté des marges de manoeuvre, plus on est éduqué, plus on gagne de l'argent ou plus on est haut placé, plus on peut mettre ses propres idées en pratique au travail.
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Enquête "Surveillance médicale des expositions aux risques professionnels".