Le secteur hospitalier cumule de nombreuses exigences de travail : horaires atypiques (nuit, week-end...) pour assurer la continuité des soins, rythmes imposés par le travail en urgence, efforts physiques, etc. Des contraintes attestées par les résultats des enquêtes nationales Conditions de travail. Celles-ci montrent que l'activité des soignants, dans les établissements de santé publics et privés, est marquée par l'urgence : en 2013, 77 % des infirmiers et sages-femmes déclarent devoir toujours ou souvent se dépêcher, tandis que 85 % doivent, de plus, fréquemment interrompre une tâche pour une autre non prévue. Les soignants ont ainsi le sentiment d'exercer un travail sous pression et de plus en plus fragmenté.
Ce sentiment est à relier à une croissance des contraintes pesant sur les rythmes de travail dans le secteur hospitalier entre 1998 et 2013, plus marquée que dans les autres secteurs d'activité. La proportion des personnels hospitaliers se disant soumis à des normes de production ou des délais à respecter en une heure est ainsi passée de 24 % à 32 %. Idem pour les délais sur une journée au plus (de 37 % à 48 %), les contraintes techniques (de 13 % à 20 %), les demandes du public (de 66 % à 73 %), etc. Ces évolutions reflètent une "industrialisation" et une technicisation de la production de soins, désormais suivie informatiquement. Elles se font principalement entre 2005 et 2013, période marquée par la mise en oeuvre d'importantes réformes hospitalières, comme la tarification à l'activité (T2A) et l'organisation en pôles d'activité.
Tensions accrues avec le public
L'entraide au sein des équipes demeure une des ressources essentielles pour réaliser le travail : en 2013, 93 % des personnels hospitaliers affirment ainsi être aidés par les collègues en cas de travail compliqué et 62 % par la hiérarchie. Et ce, alors que la polyvalence des infirmiers du secteur hospitalier a presque doublé entre 2003 et 2013, si l'on prend en compte les données de l'enquête Conditions et organisation du travail des actifs en établissements de santé, menée par le ministère de la Santé : 17 % des infirmiers doivent changer de poste en fonction des besoins du service, contre 9 % auparavant. Ces données indiquent aussi que travailler en contact avec le public, les malades ou leurs proches n'est pas exempt de difficultés. Ainsi, les tensions avec le public sur le lieu de travail se sont accrues, la part des personnels déclarant y être exposés passant de 38 % à 50 % entre 2003 et 2013. En revanche, les tensions avec la hiérarchie ont diminué et celles avec les collègues sont restées stables.
Certaines pénibilités se sont un peu allégées, même si elles restent importantes. C'est le cas des contraintes physiques (port de charges lourdes, longs déplacements à pied...). En 2013, 85 % des personnels disent en subir une, quand ils étaient 88 % en 1998. Il en est de même sur les contraintes horaires (travail le week-end, la nuit...). En 2013, elles concernent 71 % des personnels, contre 76 % en 1998. Toutefois, avec des horaires de travail imposés pour 77 % d'entre eux, les hospitaliers, essentiellement des femmes, doivent toujours jongler avec les temps de vie privés et professionnels.
Enfin, en plus des risques infectieux, les travailleurs hospitaliers sont surexposés aux risques psychosociaux, relativement aux salariés d'autres secteurs. Ils doivent faire face à une forte demande psychologique, en lien avec la réalisation de leurs tâches. Les infirmiers et sages-femmes sont les plus exposés : 75 % déclarent devoir penser à trop de choses à la fois et 59 % estiment qu'on leur demande d'effectuer une quantité de travail excessive. Les soignants sont également les plus exposés à des exigences émotionnelles : 96 % déclarent être au contact de personnes en détresse ou devoir calmer des gens.