Au cours des dernières années, le taux d'emploi des femmes seniors en France s'est beaucoup rapproché de celui des hommes de leur âge : chez les 55-59 ans, on comptait 6 points d'écart seulement en 2017 (69 %, contre 75 %) ; et chez les 60-64 ans, l'emploi des femmes devançait même celui des hommes (30 %, contre 29 %). Cela s'explique notamment par le fait que beaucoup d'entre elles ont eu des carrières interrompues et continuent à cotiser pour éviter une retraite trop faible. L'allongement des vies professionnelles, objectif des politiques publiques, a donc bien lieu - même s'il s'accompagne d'une progression simultanée du chômage des plus âgés - et il concerne davantage les femmes que les hommes. Reste à savoir dans quelles conditions il se déroule, et si ces conditions sont semblables entre les deux sexes.
Les enquêtes sur les conditions de travail des salariés retrouvent bien sûr dans ces catégories d'âge les différences ou similitudes plus générales déjà constatées entre hommes et femmes (voir encadré page 27), mais elles attirent aussi l'attention sur des particularités. La première concerne le temps partiel : chez les hommes, après 55 ans, il augmente un peu (9 %, contre 3 à 4 % aux autres âges) ; chez les femmes, son niveau est beaucoup plus élevé (35 %), mais pas spécifique à cette tranche d'âge. Point important, près de la moitié des femmes seniors à temps partiel n'ont guère eu le choix : une sur trois indique qu'elle n'a pas trouvé d'emploi à temps plein, et une sur six est à temps partiel pour raisons de santé.
Moins protégées en fin de parcours
Un autre constat intéressant a trait aux fonctions exercées. Après 55 ans, les hommes sont moins nombreux à effectuer des tâches de production ou de chantier. Le même phénomène se produit pour les femmes, mais il porte sur des proportions beaucoup plus faibles. Chez elles, la variation principale est la progression avec l'âge des fonctions de gardiennage, nettoyage ou entretien ménager, qui dépassent les 17 % après 55 ans. En lien sans doute avec cela, la baisse plus ou moins régulière avec l'âge des contraintes physiques (charges lourdes, postures fatigantes...), observée chez les hommes, n'apparaît pas chez les femmes. Tout se passe comme si les mécanismes protecteurs vis-à-vis de la pénibilité physique en fin de parcours - réaffectations, promotions professionnelles ou cessations précoces d'activité - opéraient de façon moins puissante chez ces dernières.
Enfin, dans le domaine de l'organisation du travail, les variations en fin de carrière sont, en gros, similaires quel que soit le sexe. En comparaison avec les plus jeunes, les salariés et salariées de 55 ans et plus sont un peu moins concernés par les horaires atypiques ou très contraignants et le travail dans l'urgence. En revanche, ils et elles déclarent davantage manquer de possibilités de coopérer ou d'apprendre dans leur travail. Ces variations semblables ne signifient évidemment pas que les niveaux, eux, le soient. Par exemple, chez les seniors comme à tout âge, les horaires de nuit restent plus développés chez les hommes, alors que le manque de coopération pour faire correctement son travail est plus fréquemment déclaré par les femmes.
Pour spécifier selon le genre les enjeux de santé au travail en fin de vie active, on ne peut évidemment s'en tenir à quelques comparaisons d'indicateurs chiffrés. Ceux-ci ont tout de même le mérite de pointer, dans les dernières années de vie professionnelle des femmes, des formes de précarité subie, dont les conséquences délétères affectent beaucoup d'entre elles.