Depuis sa création en 1982, le CHSCT a bien grandi. Le droit l'a forgé dès le départ comme un outil essentiel de la politique de prévention des risques pour la santé au travail, pensée désormais sous l'angle des conditions de travail. Mais son rôle a pris de l'ampleur depuis 2002, avec l'entrée dans le Code du travail de la notion de "santé physique et mentale" et, surtout, les "arrêts amiante" de la Cour de cassation, qui ont défini l'obligation de sécurité de résultat pesant désormais sur l'employeur.
Cette obligation impose à ce dernier de mettre en oeuvre une politique de prévention des risques professionnels ne tolérant, aux yeux du juge, ni défaut ni négligence, sous peine de voir sa responsabilité engagée. Cette évolution juridique a conféré au CHSCT un rôle central, puisqu'il a pour mission "de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des salariés", conformément à l'article L. 4612-1 du Code du travail. Sachant qu'il doit aussi veiller à l'observation des prescriptions législatives et réglementaires en matière d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail.
Au fil de la jurisprudence, l'avis du CHSCT est donc devenu déterminant. Le 12 juillet 2005, la Cour de cassation a ainsi estimé qu'il devait être consulté dans le cas d'un transfert d'entreprise ou d'établissement engendrant pour les salariés une modification de leurs conditions de travail. Cependant, le tournant jurisprudentiel a été amorcé le 22 novembre 2007, quand la Haute Cour a exigé une consultation préalable du CHSCT lors de la mise en place d'un système d'évaluation annuelle des salariés de nature à exercer sur ces derniers une pression psychologique néfaste pour leur santé. Le CHSCT doit en effet être consulté "avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail" (art. L. 4612-8). Il peut d'ailleurs recourir dans ce contexte à une expertise (art. L. 4614-12).
L'arrêt Snecma
Certes, l'employeur peut contester de manière motivée l'avis du CHSCT. Mais en cas de litige, portant par exemple sur un avis s'opposant à une nouvelle organisation du travail, le juge peut aussi se saisir de l'expertise menée par le CHSCT pour exiger de l'employeur qu'il revoie son projet, quitte à en suspendre la mise en oeuvre si celui-ci comporte des risques pour la santé des salariés. C'est le sens de l'arrêt dit "Snecma" rendu par la Cour de cassation le 5 mars 2008, qui constitue un deuxième tournant jurisprudentiel en renforçant les pouvoirs d'intervention du CHSCT sur les changements d'organisation du travail. Une évolution confirmée depuis par d'autres jugements, comme celui sur le système d'évaluation de type benchmark mis en place par la Caisse d'épargne Rhône-Alpes (tribunal de grande instance de Lyon, 4 septembre 2012) ou celui sur un projet de restructuration des magasins Fnac (cour d'appel de Paris, 13 décembre 2012)
Enfin, le CHSCT possède la personnalité morale, ce qui lui permet d'engager une action en justice dans le cadre de sa mission de préservation de la santé-sécurité au travail. A ce titre, le 2 décembre 2009, la Cour de cassation a précisé qu'en l'absence d'abus, les frais de procédure et les honoraires d'avocat sont à la charge de l'employeur, dès lors que l'action judiciaire engagée par le CHSCT n'est pas étrangère à sa mission, même si elle est jugée irrecevable.