Le secret médical relève des droits du patient et des devoirs du médecin ou du professionnel de santé. Il dépasse le domaine médical, puisqu'il a trait à la "vie privée" de la personne et aux "informations la concernant", selon l'article L. 1110-4 du Code de la santé publique, qui précise que "le fait d'obtenir ou de tenter d'obtenir la communication de ces informations [...] est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende". Il englobe "tout ce qui est venu à la connaissance du médecin [...], c'est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu'il a vu, entendu ou compris" (art. R. 4127-4 du même code). Ne relève donc pas du secret médical la production, par le médecin du travail, de données collectives sur les risques ou la santé au travail des salariés, dès lors que leur nombre suffit à les rendre anonymes. Même chose en réunion de CHSCT : à partir du moment où on ne parle pas du dossier médical de tel ou tel salarié, rien n'interdit au médecin du travail d'évoquer de façon anonyme des pathologies repérées lors des visites médicales, quand elles sont en lien avec des expositions professionnelles.
Les limites du secret de fabrique
Le secret médical est absolu, mais il n'est pas opposable au salarié lui-même ou à ses ayants droit en cas de décès. En revanche, même avec l'accord du salarié, le médecin du travail ne peut communiquer aucune information à un tiers. Le salarié peut toutefois lui demander une attestation pour faire valoir ses droits. Le Code de déontologie médicale et, en cas de maladie professionnelle, l'article L. 461-6 du Code de la Sécurité sociale imposent au médecin de faire le lien écrit entre la santé et le travail, y compris dans le dossier médical du salarié. Ce dernier, ou son ayant droit, peut avoir accès à ce dossier et en reproduire ce qu'il estime utile. Ainsi, refuser au salarié l'accès à son dossier médical en santé au travail (DMST) est contraire aux articles L. 1111-7 du Code de la santé publique et L. 4624-8 du Code du travail
. La transmission du DMST à un autre médecin ne peut se faire qu'avec l'accord explicite du salarié.
Si le secret médical a pour vocation première de protéger le patient ou le salarié, le secret de fabrique est, quant à lui, censé protéger l'industriel ou l'employeur. Il s'agit d'éviter que ceux qui ont accès à des secrets de fabrication en raison de leurs fonctions ou de leur mandat puissent porter un préjudice commercial à l'employeur. Ainsi, l'article R. 4624-9 du Code du travail "interdit au médecin du travail de révéler les secrets de fabrication et les procédés d'exploitation dont il pourrait prendre connaissance dans l'exercice de ses fonctions".
Le médecin du travail ou l'élu de CHSCT sont-ils obligés de renoncer à leur mission dès lors que le secret industriel leur est opposé ? Clairement non ! Quand il s'agit de santé au travail, la réglementation lève ce secret à l'égard d'acteurs comme l'inspecteur du travail, l'ingénieur prévention des caisses de Sécurité sociale, le médecin du travail ou le CHSCT, dans la mesure où ils sont soumis au secret professionnel.
Par exemple, l'article R. 4411-44 du Code du travail prévoit que l'organisme agréé auquel les industriels doivent fournir la composition de leurs substances dangereuses est habilité à livrer au médecin du travail ou aux élus de CHSCT les renseignements sur leur toxicité. Le médecin du travail ne peut par conséquent refuser d'exercer son devoir de signalement sur les risques et leurs effets, prévu à l'article L. 4624-9 du Code du travail, en se retranchant derrière un prétendu secret de fabrique.